Bouillabaisse
Turfu

Madame Nana, femme de pêcheur

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A quatre-vingt-treize ans elle incarne l’histoire des pêcheurs de Marseille.

Avez-vous aperçu Nana sur le quai des Belges, cette vieille dame qui vend des coquillages ? A quatre-vingt-treize ans elle incarne une partie de l’histoire de Marseille, celle du vieux-port et des pêcheurs des petits métiers. Qu’il vente ou qu’il pleuve, il ne neige pas souvent à Marseille,  vous trouverez Nana à côté d’un bac bleu où sont vendus les poissons à l’étal.

Car le port c’est sa vie, elle a quitté l’école à dix ans, a vendu à la Criée, aux anciennes Halle Delacroix, sur le quai… C’est marié avec le Pacha et ont eu… une flotte de bateaux… Elle a gagné sa vie car à l’époque jusque dans les années soixante-dix la mer était riche et généreuse. Les clients étaient nombreux, les supermarchés n’existaient pas et la culture culinaire du poisson était vivante.

“Le vivant au prix des morts !” clame-t-elle parfois pour encourager la vente de sa collègue. Nana, cette figure antique, a installé une petite table pliante où elle dispose deux lots de yeux de Sainte-Lucie, ceux à un Euro et ceux à deux Euros, selon la taille.

Ces opercules sortis d’un coquillage, une sorte de gros bulot, sont des portes bonheur. 

L’opercule minéralise vient d’un mollusque appelé l’Astrée rugueuse que l’on trouve fréquemment sur les rivages méditerranéens mais aussi dans des pays tropicaux via d’autres espèces de la même famille. Il peut aussi porter alors d’autres noms: Oeil de vénus, oeil de la vierge ou oeil de Shiva.

Ils ressemblent à des petites oreilles orangées. On peut glisser ce porte-bonheur dans son porte-monnaie, évidemment les petites pièces se multiplieront, on peut aussi le monter en pendentif et même en bague. 

La Madone du vieux-port de ses yeux percants et de sa grande sagesse vous dira que le Bonheur c’est surtout la santé et si elle aperçoit un enfant à vos côtés s’exclamera “Il est là le Bonheur!”

Les pêcheurs du quai qui démaillent les filets lui amènent ces bulots encore vivants dont elle retire les opercules pour les vendre.

Parfois, elle fait un tas de bulots vivants sur un plateau qu’elle met à la vente. C’est un lot qui n’est pas vraiment pesé, c’est le bada, je dirai entre un et deux kilos, le tout pour un prix minime, cinq Euros. 

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